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IQALUIT – Scott Schutz a stationné son camion de location en face des portes principales du complexe des Jeux d’hiver de l’Arctique d’Iqaluit vers 10 h en ce premier jour de juin. Le soleil était levé depuis presque huit heures déjà, travaillant sans relâche pour faire monter le mercure au-delà des quatre degrés qu’affichait le thermomètre en ce samedi matin.
L’homme âgé de 44 ans n’est pas étranger à la pratique sportive dans le Grand Nord canadien. Sa carrière de joueur de volleyball étoile à l’Université de la Saskatchewan l’a conduit à une carrière d’entraîneur, ce qui l’a amené à visiter certaines des régions les plus éloignées du pays au cours des huit dernières années afin d’enseigner et de faire la promotion du volleyball. Il réside à Kelowna, en Colombie-Britannique, mais il est entraîneur et coordonnateur des programmes de Volleyball Nunavut, qui travaille de concert avec l’Association des loisirs et des parcs du Nunavut (RPAN).
Schutz estime s’être rendu au Nunavut de 30 à 40 fois au cours des ans pour le volleyball. Mais, aujourd’hui, c’était différent. C’était nouveau. Il était là pour le football.
« Je suis un Rider Prider. J’ai des abonnements de saison, je suis né et j’ai grandi en Saskatchewan », a dit Schutz, arborant un t-shirt délavé des Roughriders.
Parce que lorsque Schutz ne visite pas le nord pour le volleyball, il s’investit dans une autre de ses passions. Il est l’entraîneur d’une équipe de flag-football à Kelowna avec ses amis Adam Witzel et Sherman Williams. Leurs fils, Brady, Chase et Dax, jouent dans l’équipe. Ils étaient à Iqaluit pour aider Scott à animer les activités de la journée. Les trois garçons serviront à montrer l’exemple lors des exercices et joueront le rôle d’arbitres lors des matchs.
Le groupe avait amorcé son périple par des visites dans les écoles le vendredi afin de présenter le sport aux élèves. Samedi, la programmation prévoyait de l’enseignement sur le terrain et un symposium pour entraîneurs organisé pratiquement sur le pouce, alors que des représentants de cinq communautés de la région allaient faire le déplacement pour en apprendre plus sur le sport et ramener chez eux de précieux enseignements.
Schutz a travaillé avec Sport Nunavut pour financer le voyage et a reçu l’appui de la LCF dans cette demande. La Ligue a envoyé sur place son gestionnaire des opérations football, Eric Noivo, afin de travailler avec les entraîneurs et d’aider à enseigner les rudiments du sport aux enfants.
« On a contacté la LCF sur un coup de tête, et Eric nous a rappelés, ce qui était très gentil », a dit Schutz. « Je pense qu’à partir du moment où on leur a dit que la LCF était intéressée par le projet, les choses se sont mises à décoller. »
La Ligue a également offert l’équipement de flag-football nécessaire, en plus de t-shirts, pour permettre aux enfants de continuer à jouer par la suite.
L’une des choses que Schutz a apprises de ses voyages dans le Nord, c’est que les choses avancent à leur propre rythme. Vendredi, il a terminé sa présentation en disant aux enfants – un groupe de 14 ans et moins et un groupe de 17 ans et moins – que la session de samedi matin débuterait à 9 h 50 et qu’ils devaient être à l’heure.
Nous sommes entrés dans le complexe vers 9 h 40 et les lumières étaient éteintes dans l’aréna dont la surface glacée est remplacée par du gazon synthétique de mai à septembre. Il y avait à peine une poignée d’enfants sur place. À 10 h 15, l’endroit était passablement plus occupé par de futurs footballeurs.
Dans ce genre de situation d’apprentissage – tout le monde joue à la position de quart-arrière, de centre ou de receveur, tout en apprenant la base du jeu défensif –, il est difficile de savoir qui se démarquera par sa compréhension plus rapide des nuances du jeu.
Ava Whitworth, âgée de 12 ans, est celle qui détonne en ce samedi. Élève de septième année à l’école située juste à côté du complexe, elle semble être faite pour le football. À la fin de la session, elle est agressive en défense et s’empare des drapeaux des quarts adverses régulièrement et elle réalise de proverbiaux « jeux explosifs » en attaque. Dimanche, elle a traversé le terrain sur un seul jeu pour inscrire un touché lors d’un match.
« C’était très amusant », a-t-elle dit après la session du samedi. Elle portait une paire de gants de receveur, un cadeau remis aux meilleurs joueurs de la journée.
« Je crois que ce que j’ai aimé le plus, c’était d’apprendre comment lancer le ballon, ce genre de chose. »
Même chose du côté de Leetia Eegeesiak, qui vient de la même école. Âgée de 13 ans, elle démontre des habiletés sportives certaines et affronter des garçons n’a rien de nouveau pour elle. Après tout, elle joue avec et contre eux au hockey, au basketball et au soccer. Tous des sports où elle excelle. Et, en passant, son sport préféré, c’est le traîneau à chiens.
Si vous avez eu la chance de goûter au flag-football, vous vous êtes rendu compte dès le premier coup d’œil à quel point ce sport peut s’adapter à ses participants pour le rendre inclusif. Garçons, filles, grands, petits, élancés ou enveloppés. Toutes les combinaisons sont possibles et bienvenues. On pense que tous les enfants pendant les activités de la fin de semaine à Iqaluit ont eu au moins leur moment pour aider leur équipe dans un match. Pour des communautés de plus petite taille qui peuvent rassembler un nombre limité de participants, le flag football est une option parfaite.
Basil Elvie a grandi à Toronto et a joué au football à l’école secondaire, puis dans les rangs juniors avec les Braves de Burlington. Il vit à Iqaluit depuis trois ans et travaille chez Qulliq Energy Corp. Avec une population d’environ 7700 habitants, ce n’est pas difficile de reconnaitre des gens après quelque temps. Elvie a offert d’être un entraîneur bénévole lors de la fin de semaine.
« J’essaie simplement d’aider les jeunes à trouver leur voie. J’en vois beaucoup le soir qui se mettent dans le trouble », a dit Elvie. « Ceci est une bonne façon pour eux de dépenser leur énergie et d’éviter les mauvaises fréquentations. »
Une fois les enfants sur le terrain, Elvie a immédiatement vu ce que le football lui avait enseigné à maintes reprises.
« Le football, c’est le sport parfait, peu importe que tu sois gros, petit, lent… », poursuit-il. « Tu peux trouver une position parfaitement adaptée, et ce sport permet aux enfants d’avoir plus de plaisir avec leurs amis, d’être plus actifs, d’améliorer leurs habiletés interpersonnelles, d’entrer en contact avec d’autres enfants et d’apprendre comment évoluer au sein d’une équipe. »
« Savoir comment travailler en équipe, c’est tellement une belle chose à apprendre parce que ça va leur servir dans leur carrière, plus tard. C’est excellent pour eux d’en faire l’expérience », a ajouté Elvie.
« C’est la même chose pour nous à Kelowna », a dit Schutz. « On mélange tout le monde. Filles, garçons… Tout le monde est de grandeurs différentes. Les filles sont toujours plus grandes chez les plus jeunes. »
« Je crois que c’est un sport qui peut être pratiqué par n’importe qui, et, comme tu peux le voir ici, tout le monde peut apporter sa contribution », a dit l’organisateur. « Ce n’est pas l’affaire d’un enfant ici et d’un autre là. Il faut jouer en équipe, il faut parcourir ses tracés et il faut savoir ce que tu fais. »
« Ils ont appris tellement vite, c’est incroyable. On en discutait avec les entraîneurs. On a joué des matchs complets une journée plus tôt que prévu, et c’était génial de voir ça », a dit Schutz.
« Savoir comment travailler en équipe, c’est tellement une belle chose à apprendre parce que ça va leur servir dans leur carrière, plus tard. C’est excellent pour eux d’en faire l’expérience »
– Basil Elvie
Pendant que les enfants étaient sur le terrain à retenir tout ce qu’on leur enseignait, plusieurs des entraîneurs se sont transformés, eux aussi, en éponges. Parmi les gens présents, il y avait des entraîneurs de Cambridge Bay (1900 km au nord de Saskatoon) et de Rankin Inlet (1100 km à l’ouest d’Iqaluit).
« Je n’ai jamais aimé le football, mais maintenant que je connais les règles, j’ai regardé un match à la télévision samedi soir, et j’ai réalisé que j’aimais ça finalement », a dit, en riant, Alayna Ningeongen, une étudiante en sports et loisirs de Rankin Inlet.
Elle enseignera le flag-football dans trois camps d’été différents cette année. L’événement à Iqaluit a touché 350 jeunes lors des visites du vendredi. Schutz disait qu’il croit que 500 autres enfants seront touchés par tout cela lorsque les entraîneurs retourneront chez eux.
« C’est bon de faire les exercices en personne », a dit Ningeongen. « C’est plus concret que de prendre tout cela dans un livre et de tenter de l’appliquer dans la vraie vie. »
Schutz croit que c’était important de tenir l’événement sur place pour donner aux enfants la possibilité de découvrir un autre sport et pour leur offrir plus de possibilités.
« Tu reconnais les habiletés athlétiques des enfants, mais tu sais aussi que le volleyball n’est pas un sport qui est aimé de tous; il y a le basketball, mais ça ne fait pas l’unanimité non plus; puis il y a le hockey et le badminton. Alors, pourquoi ne pas leur montrer autre chose qu’ils pourraient vraiment aimer », ajoute-t-il.
« Je pense qu’on a bien vu plusieurs de ces jeunes vraiment aimer leur expérience avec le flag-football. Je pense que certains sont déjà en amour avec le sport. »
Alors que les derniers matchs se jouaient dimanche, Schutz, Witzel et Williams discutaient du développement du groupe de joueurs présents et de l’espoir qu’ils avaient que ce weekend serait le début de quelque chose. La prochaine étape était de parler avec les entraîneurs locaux et de tenter de structurer un programme pour l’été afin que les enfants puissent continuer à jouer. Le gazon synthétique n’est présent que l’été, alors la fenêtre pour jouer est plutôt restreinte.
« Volleyball Nunavut et RPAN tentent de trouver différentes façons de garder les jeunes actifs, et j’aime beaucoup le flag-football », a dit Schutz. « Je pense que beaucoup de jeunes devraient y jouer, parce que c’est bon pour la coordination main-œil et que c’est juste différent. J’espère que tout cela prendra de l’ampleur avec le temps. Je savais que ça leur plairait, et c’est évident que ce fut le cas au cours des derniers jours. »