4 juillet 2020

Aucun regret : Taku Lee ravi d’avoir choisi le football

Megumi Sugita

TORONTO – Petit, le demi offensif japonais Taku Lee, l’un des deux joueurs sélectionnés à la suite des deux camps d’évaluation mondiaux de la Ligue canadienne de football (LCF) tenus au Japon en février dernier, avait deux rêves.

Joueur au football professionnellement et devenir pilote de ligne.

Il y a trois ans, l’athlète de 25 ans originaire de Nagoya, au Japon, a réalisé qu’il devait faire un choix. Il travaillait pour Japan Airlines et se préparait à amorcer sa formation auprès de l’école de pilotage de la compagnie. Il jouait aussi au football pour les Seagulls d’Obic, l’une des meilleures équipes de football du Japon au cours de la dernière décennie.

Il a choisi de faire temporairement une croix sur son rêve de devenir pilote de ligne. Il savait qu’une carrière professionnelle au football serait courte; il devait donc y dédier toute son attention. Une décision qui fut loin de plaire à sa famille, à l’époque.

Taku Lee avait deux rêves : joueur au football professionnellement et devenir pilote de ligne (Megumi Sugita)

« J’ai rêvé de devenir pilote de ligne dès l’instant où, encore enfant, j’ai mis les pieds à l’aéroport pour dire au revoir à ma sœur, qui prenait l’avion vers les États-Unis pour aller à l’université. Quand j’ai moi-même terminé mes études universitaires, j’ai commencé à travailler avec l’équipe au sol de Japan Airlines à l’aéroport de Narita. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé que pour jouer au football professionnel, je vais m’y consacrer à temps plein. Mon père ne voulait pas que je quitte mon emploi, mais je savais que c’est ce que je voulais faire. J’aurais encore le temps de devenir pilote plus tard. »

Il a donc quitté son emploi, il a trouvé un répondant pour lui permettre de survivre et il s’est mis à travailler encore plus fort, en quête d’opportunités.

Greg Quick, le directeur du recrutement mondial de la LCF, est heureux qu’il ait agi ainsi. Quick a vu Lee pour la première fois lors des camps d’évaluations mondiaux tenus au Japon, en février, et il a tout de suite su qu’il s’agissait d’un joueur spécial.

« Simplement lors des exercices, vous pouviez voir à quel point il est dynamique. Il est le demi offensif typique pour la LCF 2.0. Il peut courir avec puissance et vitesse, et il peut s’échapper du champ arrière pour se démarquer. Et quand il y parvient, il est extrêmement dangereux. Il sait où se trouve la zone des buts. »

Mesurant six pieds un pouce, et pesant 205 livres, Lee est assez robuste pour jouer au football en Amérique du Nord, mais il est le premier à admettre que le sport de ce côté-ci du Pacifique se joue de façon beaucoup plus féroce.

« J’ai eu la chance de jouer deux matchs dans la Spring League l’an dernier, et j’ai été frappé de tout bord et de tout côté. Les joueurs étaient rapides et gros, et j’ai eu mal le lendemain. »

Néanmoins, l’expérience en Spring League, bien qu’intimidante, fut précieuse et ne l’a pas dissuadé. Il a appris qu’il pouvait compétitionner à ce niveau.

À la suite des camps d’évaluation mondiaux du Japon, Lee s’est rendu à Los Angeles pour prendre part au programme EXOS se spécialisant dans la préparation en vue de camps d’évaluation.

« J’y ai passé près d’un mois plus tôt cette année, en attendant le repêchage mondial de la LCF. Mais dès la pandémie de la COVID-19 a été déclarée, je suis retourné au Japon et j’y suis, depuis, à attendre. »

Bien que l’on puisse supposer que Lee soit impatient en voyant sa grande chance de faire carrière dans le football professionnel s’éloigner en raison de la situation actuelle, ce n’est pas le cas. Il a déjà parcouru un long chemin pour arriver à ce stade. Il joue au football depuis l’âge de 12 ans. Contrairement à de nombreux endroits dans le monde, le football au Japon n’est pas basé sur un club. En d’autres termes, il suit le modèle nord-américain.

« J’ai commencé à jouer à l’école secondaire, où j’ai découvert que j’aimais vraiment jouer à la position de demi offensif et que j’étais assez doué. Je suis devenu amoureux du sport, et j’ai continué à le pratiquer tout au long de mes études secondaires puis à l’université. »

Le fait que ses parents aient eux aussi aimé le football, dans un pays où le football nord-américain est toujours considéré comme un « petit sport », l’a beaucoup aidé.

« Mes parents et ma sœur m’ont toujours encouragé. J’ai aussi joué au tennis et pratiqué le kendo, mais ma famille a vraiment appris à aimer le football. »

Lee est l’un des deux joueurs ayant été sélectionnés à la suite des deux camps d’évaluation mondiaux qui ont eu lieu au Japon en février 2020 (Megusi Sugita)

Comme le Japon possède à la fois du football secondaire et universitaire, Lee a commencé à jouer à l’école secondaire pour garçon Nanzan à Nagoya. À cette époque, il a eu la chance de vivre un échange étudiant et a vécu avec une famille d’accueil à Ashland, en Oregon. Pendant son séjour, il a assisté à des matchs de football à l’Université de l’Oregon. Il a été étonné par la foule.

Cette expérience lui a donné envie de jouer pour une université américaine, mais le tout ne s’est jamais matérialisé.

« Un ami à moi aux États-Unis a essayé de m’aider à entrer dans un collège préuniversitaire, mais mes aptitudes en anglais étaient très faibles, ce qui n’était pas suffisant pour fréquenter une école là-bas. »

Après l’école secondaire, il a joué à l’Université Keio, sous la direction de l’entraîneur-chef David Stant. Il a connu une excellente carrière et est devenu un joueur dominant, notamment lors de ses deux dernières années, où il a terminé au premier rang pour les verges au sol du circuit universitaire japonais en tant que membre des Unicorns. L’équipe nationale japonaise l’a ajouté à sa formation, et il est devenu le seul joueur universitaire de l’équipe à jouer lors des championnats du monde de 2015. Quand sa carrière universitaire a pris fin, toutes les meilleures équipes de la X League japonaise l’attendaient. Il pouvait choisir n’importe laquelle, et il a opté pour les Seagulls d’Obic.

« Mon entraîneur à l’université était alors devenu l’entraîneur-chef des Seagulls. Il m’avait tellement inspiré à l’université que je voulais seulement jouer pour lui. »

Il a donc signé un contrat pour jouer avec les Seagulls en 2017, tout en rejoignant Japan Airlines en tant que candidat pilote le même printemps. Il a démontré son talent lors de cette première campagne en étant nommé recrue de l’année de la X League. Ce qui l’a amené à prendre cette difficile décision entre le football plutôt et l’aviation – du moins pour le moment.

Greg Quick comprend.

« Taku est un joueur d’élite; c’est aussi simple que ça. Avec sa puissance et son insaisissabilité, il donnera des maux de tête aux secondeurs adverses. Nous l’avons regardé lors de ses entraînements avec l’équipe nationale et nous lui avons demandé de réaliser quelques plaqués. Il a commencé à plaquer ses adversaires tout de suite. Il pourrait être un joueur dominant sur les unités spéciales et jouer comme demi offensif. Sur les unités spéciales, il pourrait avoir le mandat de plaquer le porteur du ballon, et il performerait à coup sûr. »

En ce moment, le choix pour Lee, bien qu’il soit temporairement mis en veille en raison de la pandémie de la COVID-19, a été des plus naturels.

« Je ne le regrette pas. Avoir été choisi par la LCF est immense. Je ne connaissais pas énormément de choses à propos du football au Canada auparavant, mais j’ai eu le temps d’étudier la question depuis. Je suis impatient de m’y rendre et de jouer avec des pros. »

D’après un article de Roger Kelly publié sur CFL.ca.