Kevin Sousa/CFL.ca
HAMILTON – Vendredi soir, Zach Collaros s’est amené dans la salle des médias, quelques secondes après avoir fait son discours de remerciement à la suite de sa remise de prix du joueur par excellence 2021 de la Ligue canadienne de football (LCF).
Tiré à quatre épingles, il s’est tenu sur le podium sans broncher, lui qui vivait le plus grand moment individuel de sa carrière. Il était mieux habillé, mais ça ressemblait drôlement au 24 novembre 2019, lorsqu’il avait soulevé la coupe Grey pour la première fois de son parcours professionnel.
Bien sûr, il a dit que de remporter un championnat est plus important que les honneurs individuels et il aura la chance de doubler son bonheur dimanche, alors qu’il tentera de remporter un second match de la Coupe Grey consécutif, au Terrain Tim Hortons, contre les Tiger-Cats de Hamilton.
Pour mieux apprécier le fait que Collaros ait remporté les honneurs du joueur par excellence de la LCF pour la première fois de sa carrière de neuf saisons, il faut commencer par se remémorer le bout le plus difficile de son incroyable route.
Collaros a atterri à Winnipeg le 9 octobre 2019, sa troisième équipe cette année-là, lui qui avait subi une blessure au cours de la semaine 1 alors qu’il évoluait pour les Roughriders de la Saskatchewan. Cody Fajardo a pris la relève et il est devenu le quart numéro un de l’équipe.
Par la suite, Collaros est allé à Toronto, avec les Argonauts, l’équipe avec laquelle il a amorcé sa carrière dans la LCF en 2012. Il n’a jamais pu porter que le chandail d’entraînement des Argos avant d’être échangé aux Bombers, eux qui avaient de la difficulté à se remettre sur pieds sans Matt Nichols, blessé.
Collaros a amorcé son premier match avec sa nouvelle équipe avec une victoire contre les Stampeders de Calgary, pour ensuite permettre aux Bombers de se qualifier pour les matchs éliminatoires. Tout le monde connaît la suite de l’histoire.
Collaros a mené les Bombers à leur première conquête de la Coupe Grey en 29 ans, battant respectivement les Stamps, les Riders et les Ticats dans le match ultime. Les joueurs pleuraient sous les confettis. Ce fut tout un moment…
« Je ne crois pas qu’un autre gars que lui aurait pu accomplir le tout de cette façon », a dit l’entraîneur-chef des Bombers Mike O’Shea, à propos de Collaros.
« Dès qu’il a mis les pieds dans notre vestiaire, je savais qu’il pouvait réussir à s’intégrer rapidement. Ça n’aurait pas pu fonctionner avec quelqu’un d’autre. »
« À ce moment-là, je me disais probablement que j’allais leur montrer ce que je savais faire », a dit Collaros, cette semaine, au Winnipeg Sun.
« Et si je n’avais pas percé la formation, ils auraient pu me recommander à une autre équipe. »
Le cahier de jeux en main
En arrivant à Winnipeg, Collaros se posait énormément de questions. Pas seulement à propos de sa blessure, mais aussi à propos de la suite de sa carrière.
Il était sur la route des honneurs du joueur par excellence de la LCF en 2015, lorsqu’il s’est blessé, une saison après avoir mené les Ticats à une finale de la Coupe Grey. Son retour au jeu a tardé et lorsqu’il était de retour avec Hamilton, la formation ontarienne connaissait un exécrable début de saison avec une fiche de 0-8.
Les choses ont donc commencé à brasser à Hamilton. Il a été échangé aux Riders en janvier 2018. Mais il n’a jamais retrouvé le succès qu’il avait connu avec les Tiger-Cats.
Les blessures ont continué à s’acharner sur Collaros, lui qui n’a pas participé aux éliminatoires en 2018, pour ensuite être sur la touche en 2019.
Pour plusieurs joueurs, les blessures et les multiples transactions en une saison pourraient sonner le glas d’une carrière de joueur de football professionnel.
Voici comment quelques coéquipiers et quelques membres du personnel d’entraîneurs se souviennent de l’arrivée de Collaros à Winnipeg, comment ils ont vécu la course vers la Coupe Grey de 2019 et son voyage jusqu’aux honneurs individuels de 2021.
Jermarcus Hardrick, LO : Je le voyais se promener avec le cahier de jeux lorsqu’il est arrivé parmi nous. Je savais qu’il venait d’arriver par le biais d’une transaction et il apprenait déjà le cahier de jeux. Il était très discret.
Stanley Bryant, LO : Il était tranquille, mais dès qu’il entrait dans le caucus, il devenait lui-même. Il est drôle et aime s’amuser.
Je ne crois pas que quelqu’un doutait de ses habiletés. Notre unité savait qu’il fallait bien le protéger pour le garder dans le match. Même chose pour la Coupe Grey. Notre grande fierté est de protéger notre quart-arrière, et ce, à n’importe quel prix.
Brady Oliveira, DO : Je ne comprends pas comment deux formations ont pu le laisser partir. Je me rappelle son premier match contre Calgary. Cette passe pour le touché de Darvin Adams… C’est une vedette!
Buck Pierce, l’entraîneur des quarts en 2019 et le coordonnateur offensif en 2021 : Tout le crédit va à Zach. Il a été en mesure de prendre ses responsabilités rapidement. Il était habitué à apprendre des systèmes de jeu. Ça nous a permis de l’intégrer rapidement à l’équipe.
Zach est très précis, soucieux des détails et cultivé. Il a été en mesure d’apprendre notre système. Il se l’est approprié.
O’Shea : Je n’ai jamais douté de ses habiletés ni de son leadership. Et lorsque j’ai pu lui parler, je n’avais aucun doute sur sa santé.
Ce n’est pas parce qu’il ne jouait pas dans les autres formations que je questionnais sa capacité de sauter sur le terrain et de nous mener à la victoire.
Depuis qu’il est avec nous, ça a juste été fantastique. Ses coéquipiers l’adorent. Ils aiment qu’il les mette au défi et aussi qu’il livre la marchandise chaque fois.
Hardrick : Je ne m’imagine pas faire ça. Trois équipes en une saison. Être avec une formation pour un mois et être le partant en matchs éliminatoires… La Coupe Grey, pour la première fois en 29 ans… C’était spécial.
En 2021, Zach Collaros n’a pas pris de temps pour retrouver sa forme de 2019 (The Canadian Press).
Comme s’il faisait partie des meubles
Nous avons pu constater qu’en 2019, Collaros a naturellement pris sa place avec les Bombers. Il a maintenu une fiche de 4-0 comme quart partant et ce momentum n’a pas semblé être affecté par la pandémie de 2020.
En 2021, les Bombers ont sauté sur le terrain et ont dominé la LCF, terminant au premier rang de l’Ouest et du circuit.
Alors que les autres formations de la Ligue ont eu besoin de quelques semaines pour se remettre en forme, les Bombers avaient déjà remporté leurs deux premiers duels de la saison.
Winnipeg a même connu une séquence de neuf victoires d’affilée, en partie grâce aux prouesses de Zach Collaros.
En effet, il a mené la LCF avec 20 passes de touché, 3185 verges de gains aériens, terminant la saison avec 70,2 % de ses passes complétées — son meilleur résultat en carrière.
Mis à part les statistiques, son éthique de travail et sa patience ont volé la vedette. Son attaque ne se hissait pas nécessairement dans les jeux de la semaine à chaque match, mais son expérience a permis aux Bombers d’être les meilleurs.
Tommy Condell, le coordonnateur offensif de Collaros à Hamilton en 2014 et 2015 : Je crois que O’Shea fait de l’excellent travail. Tout comme Orlondo Steinauer, c’est l’alpha de la bande. Il a été en mesure de créer une culture gagnante. Par la suite, on peut constater à quel point Zach a de l’influence sur la structure de jeu de la formation. Le respect entre Collaros et le personnel d’entraîneurs est mutuel.
Collaros : Ma femme le savait que ça allait fonctionner en 2019.
Cette saison, Collaros a mené la LCF avec 20 passes de touché (The Canadian Press).
Se remettre dans sa meilleure forme
La remise en forme de Collaros a été l’une des meilleures histoires de la saison. Au cours de sa première campagne complète avec les Bombers, il a eu l’air de retrouver sa forme d’antan, celle qui lui a permis de dominer avec les Ticats.
Il est encore en mesure d’atteindre ses cibles avec de longues passes. Il semble avoir redécouvert son habileté à se défaire de la pochette de protection, d’improviser un jeu et de permettre à l’attaque de se poursuivre.
Lorsqu’il s’entretenait avec les médias à la suite de sa victoire au Gala de la LCF, vendredi soir, il a parlé de l’histoire du prix qu’il venait de remporter et de tous les grands noms auxquels il était maintenant rattaché.
Sa confiance est bel et bien de retour et il est prêt pour tous les combats.
Chris Van Zeyl, LO et le coéquipier de Collaros à Toronto en 2012 et en 2013 : Beaucoup de choses sont faciles à voir lorsque nous regardons Zach : son style de jeu, sa personnalité. C’est un tireur d’élite qui est capable de courir pour se sortir du pétrin.
Lorsque nous le regardons jouer, c’est comme si nous assistions à des jeux d’un enfant dans sa cour. C’est un gars fantastique, mais ce dimanche, c’est l’ennemi.