3 juin 2020

Geroy Simon : « Les gens sont en colère et ont perdu espoir »

The Canadian Press

VANCOUVER – Nous le connaissons tous en tant que Superman, le superhéros. Mais peu d’entre nous qui avons apprécié ses moments de football avec les Lions de la Colombie-Britannique dignes du Temple de la renommée savent tous les obstacles qu’il a dû surmonter avant d’atteindre ses objectifs.

Alors que les manifestations et la grogne populaire se poursuivent au sud de la frontière, en réponse au meurtre tragique de George Floyd par la police de Minneapolis, Geroy Simon a été occupé à partager sa propre histoire sur la discrimination raciale.

L’une des nombreuses entrevues de lundi dernier a été faite par Don Taylor et Jeff Paterson sur les ondes de TSN 1040. Le premier sujet qu’ils ont abordé est la réaction vis-à-vis du meurtre de Floyd.

« C’est très décevant de voir un autre homme noir se faire tuer par la police aux États-Unis », a expliqué Simon. « Évidemment, ça arrive depuis longtemps et je crois que les gens sont tannés, les gens sont en colère et plusieurs personnes ont perdu espoir. »

La légende des Lions de la C.-B., le receveur Geroy Simon, a été intronisé au Temple de la renommée du football canadien en 2017 (The Canadian Press).

Les animateurs ont aussi demandé à Simon de se remémorer un incident dans lequel il a été victime de discrimination par les forces de l’ordre. Ça s’est produit pendant sa période universitaire au Maryland, alors qu’il rencontrait des agents en vue du repêchage de la NFL.

ENTREVUE COMPLÈTE : Geroy Simon avec TSN 1040 sur la tension raciale au sud de la frontière

« Je sortais de mon appartement et deux policiers mon tout de suite dit de me coucher par terre, en me pointant avec un fusil », a dit Simon. « Je n’avais rien fait de mal, alors je leur disais “Je ne me coucherai pas par terre puisque je n’ai rien fait de mal”. Heureusement, l’un des policiers a été en mesure de me convaincre de me coucher par terre et de mettre mes clés à côté de moi. Si je ne l’avais pas fait, les choses auraient pu tourner au vinaigre et je ne serais peut-être pas en train de vous parler. »

« J’ai vécu plusieurs de ces expériences. Celle-là a été la pire des expériences. C’est tellement malheureux de devoir se méfier et d’avoir peur chaque fois que la police vous interpelle. C’est triste. »

Dès son jeune âge à son domicile à Johnstown, en Pennsylvanie, Simon connaissait déjà le racisme. Il a même grandi dans le même quartier où un membre du Klu Klux Klan habitait.

« J’étais ami avec son plus jeune fils », a dit Simon. « Nous sentions que c’était là, que sa présence se faisait sentir et c’était au bout de la rue où nous habitions. Nous savions qu’il était mieux de se tenir loin de ce lieu, nous savions tout l’impact qu’il pouvait avoir. »

« J’adore ma ville d’origine, mais c’est l’un des endroits les plus racistes aux États-Unis. C’est quelque chose avec lequel tu apprends à vivre. Vous savez que ça existe, que c’est là, mais vous continuez à vivre. »

« C’est très décevant de voir un autre homme noir se faire tuer par la police aux États-Unis. Évidemment, ça arrive depuis longtemps et je crois que les gens sont tannés, les gens sont en colère et plusieurs personnes ont perdu espoir. »

– Geroy Simon

Le documentaire « The Last Dance » qui a récemment fait irruption dans le monde sportif nous a rappelé ce sujet chaud à débattre : est-ce que les athlètes professionnels ont le devoir, de par leur statut, de s’exprimer sur la place publique concernant des sujets sociopolitiques?

« La plupart du temps, les athlètes ne s’expriment pas sur ces sujets », a expliqué Simon. « Ils ne veulent parler que de leur carrière sportive. Moi-même, je ne suis pas quelqu’un qui parle de tout ça ouvertement.»

« J’ai senti que c’était mon devoir d’en parler, puisqu’il y aura des gens qui écouteront. Nous avons de l’influence et je crois qu’il est important que les gens avec un certain statut utilisent ce leadership. »

« Bien sûr, plusieurs de ces personnes ne le feront pas. Il faut donc que quelqu’un le fasse. »

À la suite de sa retraite, Simon a choisi de demeurer et de travailler au Canada pour plusieurs raisons. L’une d’elles est que ça lui permet de rester près de la famille des Lions. Une autre raison est le fait que ce pays — comme il l’a fait pour plusieurs joueurs afros-américains avant lui —, l’a accueilli à bras ouverts et l’a vu pour ce qu’il était : un membre de la race humaine.

« Nous serions naïfs de croire qu’il n’y a pas de racisme, ici, au Canada ou même en Colombie-Britannique et à Vancouver, mais il n’est pas aussi apparent », a dit Simon, le meneur de l’histoire de la Ligue canadienne de football (LCF) au chapitre des verges de gains sur des réceptions.

« Moi, en tant qu’homme noir, c’est l’une des raisons pourquoi je vis au Canada, l’une des raisons pourquoi je vis en Colombie-Britannique. C’est parce que je me sens en sécurité lorsque je sors ou lorsque je conduis ma voiture. Si je me fais arrêter sur la route, je n’ai pas peur de mourir parce que je suis noir. »

D’après un article de Matt Baker, paru sur CFL.ca