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17 juin 2020

Tobi Antigha boucle enfin la boucle avec les Bombers

Argonauts.ca

WINNIPEG – Tobi Antigha peut maintenant en rire un peu, car, avec le recul, l’histoire de son arrivée dans la Ligue canadienne de football (LCF) et la façon dont il a finalement joint la formation des Blue Bombers de Winnipeg est plus qu’un peu bizarre.

Tout a commencé avec un entraînement il y a environ trois ans et demi devant le directeur général adjoint des Bombers Danny McManus, suivi de deux camps pour joueurs autonomes avec les Roughriders de la Saskatchewan et d’un autre entraînement avec Winnipeg, puis d’un premier camp d’entraînement avec les Riders à Saskatoon en évoluant à une position où il ne comptait que trois matchs d’expérience… à l’école secondaire.

Oui, ça fait beaucoup de détails à assimiler en un seul paragraphe.

En fait, quand Antigha a été interrogé sur ses premiers pas dans la LCF, le secondeur de 27 ans a commencé par :

« Oh, wow… Avez-vous du temps devant vous? »

Nous en avons, oui, et, pour bien comprendre les choses, retournons à l’hiver 2016-17, lorsque Antigha, un receveur du Blue Hose de l’Université Presbyterian College, avait d’abord attiré l’attention de McManus. Le recruteur des Bombers a travaillé avec Antigha en novembre 2016, mais ne lui a pas proposé de contrat à l’époque. Cependant, il lui a dit que l’équipe était intriguée et souhaitait demeurer en contact avec lui.

Alors qu’il attendait d’obtenir des nouvelles des Bombers, Antigha a reçu une invitation pour un camp pour les joueurs autonomes des Riders à Orlando en décembre.

« Je me suis entraîné comme receveur », a d’abord expliqué l’athlète originaire de Tampa, en Floride. «Vers la fin de la séance, Chris Jones (le directeur général et entraîneur-chef des Riders à l’époque) souhaitait évaluer deux joueurs de ligne offensive, mais il n’avait aucun joueur de ligne défensive sous la main pour les affronter. Il a donc demandé à tous les autres joueurs de se mettre en rang et d’essayer de déployer tour à tour leurs meilleures techniques afin de contourner et de battre ces joueurs de ligne offensive. J’étais l’un des seuls à connaître un semblant de succès, ou du moins à continuer d’essayer. Il y avait des joueurs qui ne voulaient tout simplement plus compétitionner, et j’étais l’un des seuls à continuer à me relever et à essayer. »

« Après la séance, Chris Jones est venu me dire qu’il ne m’embaucherait probablement pas comme receveur, mais que si j’ajoutais de la masse musculaire à mon corps, il me réévaluerait comme ailier défensif la prochaine fois qu’il serait à Tampa. Un mois plus tard, il est revenu à Tampa, j’avais pris quelques livres et j’ai connu un autre bon entraînement. C’est à ce moment-là qu’il m’a invité à un mini-camp, et le reste est passé à l’histoire. »

En quelque sorte, oui…

Après le second camp avec les Riders, et après avoir reçu les instructions d’ajouter un peu de masse musculaire à son corps – ce qu’il a fait en prenant 25 livres –, Antigha a reçu un appel des Bombers, qui voulaient l’évaluer de nouveau… comme receveur. Il a donc perdu ces 25 livres, il s’est présenté au camp des Bombers, mais le club a opté pour T.J. Thorpe, qui a joué six matchs avec Winnipeg en 2017.

Les Riders ont par la suite offert un contrat à Antigha, qui a de nouveau pris du poids afin de se préparer en vue du véritable camp d’entraînement.

Il n’y a pas que sa santé physique qui a été éprouvée par tous ces gains et pertes de poids. Sa santé mentale était également en jeu.

« Quand Chris Jones m’a demandé pour la première fois de jouer comme ailier défensif, j’ai considéré le tout comme un manque de respect », a-t-il dit. « Je me disais : “Que voulez-vous dire par le fait que vous ne m’embaucherez pas comme receveur? Je me débrouillais pourtant bien.” Puis, quand j’ai mis les pieds au camp d’entraînement, j’ai compris pourquoi il m’avait dit cela. J’ai regardé notre formation et nous comptions sur des joueurs comme Naaman Roosevelt, Bakari Grant, Chad Owens, Duron Carter et Rob Bagg. Il aurait donc été difficile pour moi de percer la formation comme recrue et de conserver une place au sein de celle-ci. Ça n’avait rien à voir avec moi, personnellement; c’était ce dont l’équipe avait besoin pour cette saison ou à ce moment-là. »

« Tout dans cette transition en défense a été difficile. Vous devez comprendre que j’ai pris part à un camp d’entraînement où des emplois sont en jeu. Un camp d’entraînement est tellement plus éprouvant, et j’étais en compétition pour un travail avec des joueurs qui avaient évolué en défense pendant toute leur vie. Certains d’entre eux avaient joué dans la NFL. Certains autres étaient des ailiers défensifs décorés. Et moi je devais rivaliser avec eux juste pour obtenir un emploi. »

« Ce qui est fou, c’est que j’ai dû apprendre chaque jour comment jouer à la position d’ailier défensif. Ç’a été très difficile d’être jeté dans le feu comme ça, mais ç’a fonctionné : j’ai eu la chance de pouvoir continuer à jouer. »

Antigha a vu l’essentiel de son travail en trois ans dans la LCF – deux ans en Saskatchewan et un an (l’an dernier) avec Toronto – comme ailier défensif. Mais il est suffisamment polyvalent pour descendre d’un niveau et pour évoluer comme secondeur, et il espère obtenir une chance comme secondeur du côté court, un poste habilement occupé par Kyrie Wilson l’an dernier.

Des options se sont offertes à lui lors de l’ouverture du marché des joueurs autonomes, mais les potentiels intéressés lui ont presque tous dit qu’ils n’étaient pas certains de la position où il évoluerait en défense. Tous, sauf les Bombers.

« Winnipeg a été la seule équipe à avoir dit à mon agent : “Nous savons ce que nous allons faire avec lui, nous savons comment nous allons l’utiliser” », a expliqué Antigha. « Évoluer avec les Bombers me semblait tout à fait naturel, en plus de tout ce que je savais déjà sur Winnipeg et à quel point l’équipe revenait avec tant de partants en attaque et en défense : ils ont toujours Willie (Jefferson), Adam Bighill et une solide défense. »

« Mais l’élément qui a eu le plus de poids, c’est Richie Hall. J’ai fait mes recherches sur Richie Hall, et sur son succès et ses antécédents dans la LCF. Il utilise les meilleurs atouts de ses joueurs depuis des années. Je voulais me joindre à une équipe avec laquelle j’allais être utilisé comme Jones l’avait fait avec moi en Saskatchewan. »

Le troisième fils d’immigrants nigérians, Antigha n’a jamais oublié tout le travail que ça prend pour réaliser ses rêves. Lui qui est diplômé en science politique, il a aussi une bonne perspective de la place que prend le football dans sa vie et de façon plus large.

Il faut considérer le fait que deux ans après sa graduation et au cours de son premier camp d’entraînement dans la LCF, Antigha s’est aussi entraîné avec des espoirs de la NFL afin de garder la forme, en plus de travailler en tant que gardien, tout en balayant des courts de tennis.

« Lorsque je repense à tous ces entraînements avec Winnipeg et la Saskatchewan, je me rappelle que je me disais “Ce pourrait être ma seule chance. Je dois faire quelque chose” », se souvient Antigha. « Au cours du premier mini-camp des Riders, j’ai subi une contusion à la cheville, lors de la deuxième journée. Je ne pouvais donc pas performer comme je le voulais. »

« Je me réveillais deux heures avant tout le monde pour déjeuner et me rendre sur le terrain et m’échauffer. Je voulais que ma cheville soit prête pour la séance d’entraînement et que ça ne paraisse pas trop que j’étais blessé. J’ai fait ça pour trois jours consécutifs. »

« Il faut oublier ce genre de chose et comprendre que c’est l’occasion de ta vie. Il faut accomplir le travail. Maintenant, je suis chanceux. Je pratique le sport que j’aime. »

D’après un article d’Ed Tait publié sur CFL.ca